BIENVEILLANCE,  RESPECT

Et si on avait toutes subi des violences obstétricales/gynécologiques ? #payepastongynéco

Chère Harmonie,

Je t’écris cette lettre alors qu’à cette heure j’aurais dû être dans la salle d’attente de ma gynécologue. Si je n’y suis pas, c’est parce que j’ai annulé ce rendez-vous après l’avoir décalé plusieurs fois. Je me disais que je programmais ces entrevues de proche en proche pour trouver des réponses si question j’avais et de ne pas devoir attendre 3 voir 4 mois pour les obtenir – car oui avoir un rdv gynécologique est en soi déjà un parcours du combattant. Entre choisir une personne sur un annuaire devant laquelle tu vas te déshabiller et écarter les jambes et obtenir une date qui ne soit pas trop lointaine, nous avons déjà du mérite, nous, les personnes avec un vagin. Mais revenons-en à nos spéculums, en réalité, j’ai réalisé hier soir que tout ce que j’avais envie de lui exprimer était ma colère. Je n’avais pas de questions en tout cas aucune à laquelle elle pourra me donner de réponses. Non, j’ai juste de la colère a évacué. Cette colère qui s’est accumulée depuis mon adolescence et qui s’est décuplée suite à mes fausses couches. Toute cette colère face à la façon dont elle et les autres professionnels de santé que j’ai rencontré m’ont traité, ont traité mon corps, mon esprit et mes sentiments de femmes.

En me réveillant ce matin, j’étais donc partagée entre aller tout lui balancer à la figure et finir par craquer et pleurer voir crier ou alors rester muette à hocher docilement de la tête face à son monologue d’environ 2min30 pour 60 euros de consultation comme je l’ai fait jusqu’alors, trop impressionnée et placée dans ma condition de patiente qui ni connait rien de laquelle je n’ose pas sortir – ce fameux effet blouse blanche. Finalement, j’ai choisi d’annuler et j’ai décidé que j’allais lui écrire une lettre à elle et aux autres pour leur dire tout ce que j’ai sur le cœur – au moment où cette lettre paraît, je ne les ai pas encore écrite. Rédiger celle-ci et les stories instagram que j’ai faite ont permis pour l’instant de me défouler. Oser dire même si c’est à personne de particulier et jeter mes mots sur le clavier permettent sans aucun doute de libérer ma parole et de laisser cette colère aller. Mon chakra de la gorge en est libéré déjà un peu je pense. Bref, nous voici donc à parler d’un sujet délicat comme toujours via le prisme de mon expérience et de mon point de vue.

Les violences obstétricales ou gynécologiques, c’était un sujet qui traînait dans la liste (de plus de 50 articles) des brouillons sur ce blog. Une thématique que je tenais à aborder, mais pour laquelle je ne me sentais pas légitime. Après tout, personne n’a été violent avec moi, me disais-je. J’ai donc regardé les définitions de ce qu’englobent ces termes. Je t’invite à jeter un oeil à ce site.

Qu’est ce que c’est ?

Si on y prends les définitions détaillées, je ne suis pas sûre que je peux dire que j’ai subi de telle violence par contre si je me réfère à la définition globale des deux termes qui dit :
« Les violences obstétricales et gynécologiques sont, au regard des nombreuses lectures de témoignages reçus par le Collectif S.I.V.O, un ensemble de gestes, de paroles et d’actes médicaux qui vont toucher à l’intégrité physique et mentale des femmes de façon plus ou moins sévère. »
Ce site évoque surtout le fait que ce terme regroupe l’absence de tout un tas de choses comme l’absence :

  • De consentement libre et éclairé
  • De choix et de diversité dans l’offre de soin
  • De consentement des actes à des fins d’apprentissage
  • D’anesthésie efficace
  • D’utilité médicale avérée*
  • D’exercice des gestes obstétricaux dans un cadre légal*
  • D’humanité et de dignité
  • Du respect des droits de la patiente
  • De pratiques conformes aux données scientifiques

Et pour moi, il manque dans cette liste l’absence d’empathie et l’absence d’explications permettant aux patients de comprendre ce qu’il lui arrive (je ne parle évidemment pas ici des urgences vitales ou évidemment il est clair qu’il n’y a pas le temps pour ça, mais dans une vie de femme il y a peu normalement de moment où ça vit est en danger quand elle va voir son gynécologue pour un bilan.

Ainsi, au vu de tout cela, je continuais à me dire que je ne pouvais pas utiliser un terme aussi fort pour parler de mon expérience.

Pourtant, alors que le film de mes rendez-vous médicaux bâclés se déroulait sur mes yeux. J’ai réalisé que je me voilais la face. Certes, on ne m’a pas fait une épisiotomie sans mon consentement, on ne m’a pas enfoncé un spéculum dans le vagin alors que je pleurais ou fait un curetage ou je ne sais quoi sans que l’anesthésie ne fonctionne. Non et heureusement ! Quand je lis les témoignages des femmes qui ont vécu cela mon utérus et mon cœur de femme saigne et face à ça, je me disais que je ne pouvais pas assimiler ce que j’ai vécu à ce genre de chose. Comme si le fait que je dise que si j’ai vécu des violences d’un autre niveau certes, réduisent la souffrance de ces femmes.

Mais, je crois qu’il est important de le dire et de ne pas nier ce qu’on a vécu car, si, j’ai subi des violences gynécologiques. Des violences physiques plus ordinaire (mais qui ne doivent pas ou plus être à mon sens banalisées) comme la non-information de ce que l’on va te faire tout simplement, les gestes précipités et pas toujours doux. J’ai simplement été blessée, infantilisée, niée. Et même si je ne suis pas marquée dans ma chair, je le suis dans mon esprit. Cela reste de la violence. Ce que j’ai subi qui a été vraiment douloureux, ce sont les mots, les regards, les attitudes de ces personnes. Cette violence plus insidieuse qu’on ne peut pas voir, qui ne laisse pas de trace à part sur notre âme.

Ce qui est fou, c’est qu’aucun des médecins que j’ai rencontré n’étaient malveillants. Non, vraiment, je ne pense pas que je suis tombée sur des « méchants ». Pas du tout. Juste des médecins, des docteurs qui ont baignés toutes leurs études et leur carrière dans une ambiance patriarcale et qui reproduisent ce qu’on leur a appris sans aucune connaissance de l’impact de leurs actions ou inactions sur les femmes qu’ils suivent.

C’est bien beau tout ça ! C’est ce que tu dis, Harmonie ? Tu vas faire pleurer dans les chaumières. Eh bien, ce n’est pas mon intention. Je refuse simplement de nier un jour de plus ce que j’ai vécu et à quel point j’en ai souffert. J’espère que celles et ceux qui liront ces mots réaliseront que même si ce n’est pas « si grave », ce n’est pas « normal » et que ce genre de choses ne devraient jamais arriver.

Afin de me libérer de tout cela et peut-être de vous sentir vous aussi légitime de vous sentir mal face à ce genre de situations, je vais vous raconter toutes mes expériences qui me laissent un goût amer. Ces expériences dont j’ai honte, car j’aurais du parler, insister, m’outrer, bref réagir et ne pas rester tel un pantin muet…Vous connaissez ce sentiment peut-être ?

Allons y ! * Je vais parler en tu car c’est une façon d’écrire qui me parait approprié dans ce cas car très inclusif !

  • La première violence que tu as subie a été celle quand tu avais 15 ans. Ton médecin de famille t’a prescrit la pilule comme on aurait prescrit des bonbons. Sans explication, aucune, sur l’impact sur ta santé ni sur les autres choix qui se proposaient à toi. Et toi, docile, tu n’as rien demandé.
  • La seconde fut lors de ton premier rendez-vous gynécologique avec ta mère où tu as subi un interrogatoire poussé sur tes pratiques sexuelles. Tu as répondu, encore une fois docilement, sans savoir qu’elle n’avait pas à poser ce genre de question. Que c’était juste du voyeurisme et du jugement…
  • La troisième fut quand cette même gynécologue te pesa et t’informa que tu étais trop grosse – car tu avais pris 2 kg en 1 an alors que tu avais aussi grandi- et que tu devais faire attention ! Ce qui a engendré chez toi pendant plusieurs années un dégoût de ton corps !
  • La quatrième quand elle décida sans te demander ton avis de te prescrire la DIANE 35 pour supprimer ton acné alors que tu n’avais rien demandé et sans t’expliquer que cette pilule avait plus d’effets secondaires que les autres.
  • La cinquième fut quand suite à la prise de cette pilule, tu eus des règles douloureuses et abondantes, ainsi que des effets sur ta libido, ton humeur et qu’elle te qualifia de chochotte quand tu lui exposas ces faits. Elle ne te changea pas de contraception et te prescrivit de l’antadys.
  • La sixième fut quand elle te mit au régime car cette pilule te donnait en fait du cholestérol plutôt que de te proposer une autre contraception.
  • La septième fut quand après avoir arrêté la pilule, tu allais voir une autre gynécologue pour trouver un autre moyen de contraception que la pilule et qu’elle te prescrivit une autre pilule parce que c’est ce qu' »il y a de mieux à votre âge et de plus efficace » sans prendre en considération tes valeurs et ton ressenti.
  • La huitième fut le jugement quand une année plus tard, tu lui déclarais avoir arrêté la pilule et suivre une contraception naturelle : « si vous êtes prêt à accueillir un enfant, vous pouvez faire ce que vous voulez ».
  • La neuvième fut quand tu appelais pour prendre un rendez-vous après ton test de grossesse positif. « On a pas de place avant 3 mois mais ça suffira bien ! » « Mais si j’ai des questions ? » « Eh bien ça attendra le rdv de datation »

J’ai décidé ici de ne pas parler des toucher vaginal systématiques, des frottis et autres qui pourtant ne sont pas nécessaire pour la prescription de pilule. Ni de la position « gynécologique », les deux pieds dans l’étrier avec le visage du gynéco devant sa vulve parce que d’autres en parlent mieux que moi ! Oui il y a d’autres positions possibles, moins inconfortables et moins génante, et oui les examens ne sont jamais obligatoires….

Venons-en maintenant aux fausses-couches :

  • L’appel puis le rendez-vous pour des pertes et des douleurs à 9 SA : « Allez aux urgences! » « Mais pourquoi? c’est grave ? Je suis au travail, je ne peux pas partir comme ça… je comprends pas ». »Venez au cabinet alors, maintenant ». Puis dans le cabinet, la sonde froide enfoncée dans ton vagin sans explication préalable, les mots froids : « y’a pas de cœur, mais il est trop petit de toute façon ». Devoir insister pour qu’elle explique ce qu’elle voit sur l’échographie : « mais qu’est ce qu’on voit ? C’est normal ?… » pour avoir des réponses laconiques, voir pas de réponses. La négation de toutes tes questions sur la grossesse comme si elle n’existait déjà plus alors que le verdict n’avait pas été posé. L’absence d’explication sur ce à quoi tu devais t’attendre si c’était une fausse couche, combien de sang tu risquais perdre, qu’est ce que tu allais perdre, comment tu saurais si c’est une fausse couche, qu’est ce que tu devrais faire, quand devrais-tu m’inquiéter… Juste ces mots  » si vous avez trop mal, prenez un spasfon, si ça saigne trop, allez aux urgences ! » Mais qu’est ce que ça veut dire !!! L’absence de demande de comment tu te sentais, si tu te sentais capable ou non de retourner au travail ou même de rentrer chez toi seule, comment tu avais expliqué ton départ précipité à tes collègues… Rien ! Comme si il ne s’était rien passé ! La négation et le manque d’information qui ont fait quand je tu vidais de ton sang sur tes toilettes en pleurs, pliée de douleurs, tu n’as pas osé rappeler ou aller aux urgences…
  • Il y eut ensuite les rendez-vous de contrôles, froid, sans explication, seulement un ou deux mots à chacune de tes questions pour nier la gravité de ce que tu vivais. « ça arrive souvent « . « 1 grossesse sur 3″.  » 1 femme sur 4″ point. Aucune question sur comment tu le vis, si tu as besoin d’en parler (à part par la remplaçante à qui tu n’as pas bien sur pu répondre car on avait déjà tellement nié ton ressenti que tu pensais de pas avoir le droit d’être triste).
  • Les prises de sang avec les remarques maladroites des laborantines. « C’est un peu tôt pour un test de grossesse, vous pouvez pas être enceinte ! Faut savoir être patiente ! « … Alors que tu ne venais pas pour un test de grossesse…
  • Le temps a passé et il y a eu le moment où tu as commencé à penser qu’il pouvait y avoir un problème. L’insistance que tu as dû avoir pour obtenir une pauvre prise de sang mais « c’est bien pour vous rassurer ». Aucune question, étude, prise en compte de tes cycles, explications… Rien. « Prenez de l’acide folique. »
  • A force d’insistance, vous avez eu pléthores d’examens :
    • L’hystérographie. Tu dois prendre un rdv à l’avance juste après tes règles, alors qu’on ne sait jamais quand elles vont tomber. On t’allonge nu sur une table de radio. On te dit que ça sera comme des règles douloureuses et on met ton utérus sous pression avec un liquide jaune visqueux qui mettra des jours à s’évacuer (et non 24h maximum comme il avait dit !). Nue sur la table, on t’interroge sur la fréquence de tes rapports en se penchant au-dessus de toi, en utilisant des mots simples pour que tu comprennes parce que tu as l’air bien neuneu quand même. Puis on laisse la seringue se balader sur la table et quand on la fait bouger pour prendre l’image, elle se coince et arrache le tout de ton vagin avec une partie de tes muqueuses. On te dit que tu vas saigner un peu. Puis, on te file une serviette hygiénique qui ressemble à une couche qui est vite pleine de sang et de liquide jaune qui colle. Ils te fontattendre encore. On t’appelle et dans une petite pièce, le médecin te fait asseoir sur une chaise et s’assied sur une table. Il te surplombe, se penche sur toi et parle tout doucement avec des mots très simple en te tutoyant. « Tu vois, pour que les spermatozoïdes – tu sais ce qu’il y a dans le sperme de l’homme — puissent atteindre ton ovule, il faut que tes trompes, tu sais ce qui relie les ovaires à l’utérus, là le fin filament blanc, soit dégagé. Et chez toi, tout est ok ! Tu as des questions ? Non ? Si c’est pas clair, tu peux toujours me rappeler. » Clin d’œil ! Tu te dépêches de sortir de cette pièce où l’atmosphère t’oppresse ou tu n’as même pas réussi à décrocher deux mots tellement tu es choquée de comment il s’est adressé à toi.
  • Il y a eu aussi le rendez-vous chez la spécialiste de l’infertilité qui n’a pas ouvert ton dossier avant que vous arriviez et vous déclare : « Vous avez quel âge ? 30 ans ? »- non 28 !- « Ah pardon, j’ai mélangé les dossiers. Donc jamais de grossesse depuis que vous essayez ! » -Si deux et deux fausse couche ! – « Ah pardon, c’était pas noté !  » – Si c’est écrit ici ! – « Ok et vous avez vu les embryons? » – Oui mais il était déjà mort ! – « Oh ben ça va alors c’était très tôt dans la grossesse, vous n’avez pas eu le temps de vous projeter ! Bon très bien ! Et sinon vos ovaires tout ça on y a regardé ? – Oui ma gynéco a tout mis dans le dossier – « Ah oui? On vérifie si ça vous ennuie pas ? » […] « Ah vous ovulé à droite ! Si y’a bébé ce mois-ci il sera de droite, j’espère que ça vous dérange pas vu que votre utérus penche à gauche, c’est peut-être une orientation politique ? hahaha! » […] « Bon ben on va faire des examens. » Elle vous fait une liste d’ordonnance longue comme le bras. « Vous revenez quand c’est fait ! De toute façon, si tout est normal, on commencera par stimulation ovarienne simple puis si ça marche pas insémination + stimulation et sinon FIV. » – Mais si tout est normal, je comprends pas et mes cycles alors ? – « Vous avez des règles régulières » – Oui, plutôt –
  • « Ok, de toute façon, on verra avec vos résultats, mais monsieur vous devriez maigrir. »
  • L’hystéroscopie. Faite dans une maternité avec 3 h de retard et donc 3 h d’attente dans une salle pleine de femme enceinte ou de femme avec des jeunes enfants. Puis un médecin qui dit : « Pourquoi vous êtes là? » – Pour faire une hystéroscopie –
  • « Vous savez à quoi ça sert ? » – Oui, je crois, si j’ai bien compris ce que j’ai lu sur internet, c’est pour voir si tout est ok au niveau de l’utérus et des trompes, si y’a pas de cloison ou autre chose qui empêche une bonne nidation ou qui déclenche mes fausses couches.- « Ok, ben on y va mais vu votre âge et vos autres examens, ça ne sert à rien, il faut juste savoir être patient et lâcher prise, madame ! » […]  » Bon,je vais vous désinfecter le vagin et la vulve » dit-il alors qu’il a déjà fini d’appliquer le produit froid et piquant (tu auras une mycose ensuite bien sûr) puis il passe la sonde et ne commente pas les images. Tu dois insister pour qu’il t’explique ce que l’on voit. Ça dure moins d’une minute. Il prend deux photos, retire la sonde et te laisse avec l’infirmière. Elle te dit de te lever. Tu essayes mais il a tellement incliné le siège que tu glisses et manques de t’étaler par terre. Elle te tends une serviette hygiénique de mammouth mais cette fois tu as prévu le coup, tu as ramené les tiennes. Tu vas vers le vestiaire et là tout le liquide tombe d’un coup au sol et arrose tes pieds tes jambes et nappe le sol. Tu es toute seule dans la pièce et tu éponges comme tu peux avec ce que tu trouves. Personne ne revient alors, tu laisses et te rhabilles à la vite. Le médecin t’attends. Il te dit « tout est ok ! C’est comme je vous ai dit, faut juste être patiente, madame. » Tu oses répondre pour une fois : « Oui, mais c’est important d’avoir des réponses, sur les fausses couche notamment. » Il répond avec un air hautain « y’a rien dans votre utérus qui les a provoqué, ça arrive c’est tout. Bonne journée, vous pouvez aller payer au secrétariat. »
  • Le dernier rdv avec la spécialiste après tous vos examens de fertilité. Elle confirme que vos examens n’ont montré aucune anomalie. Encore cette fois, elle n’a pas regardé notre dossier avant que vous arriviez, elle déclare des faits qui ne vous concernent pas et vous devez la corriger à de nombreuses reprises. Elle vous dit : « On peut donc commencer une stimulation ovarienne simple. » Tu lui expliques que tu ne comprends pas, s’il n’y a aucune anomalie, pourquoi t’injecter des hormones ? Elle te répond qu’il y a peut être un petit problème hormonal qu’on ne peut pas détecter et comme ça on verra si c’est ça et puis c’est la procédure dans votre cas. Tu insistes en disant que tu n’es pas pour les hormones. Tu lui demandes si y’a pas d’autre choses à faire avant, qui soient plus naturelles. Elle te réponds avec mépris que tu peux bien tenter l’acupuncture si ça te fait plaisir, mais que c’est pas son travail. Que si tu ne veux pas d’hormone, rien ne t’y oblige, mais qu’elle ne pourrait alors rien faire pour vous, c’est à vous de voir (sous entendu de voir si vous avez vraiment envie d’avoir des enfants et de faire le nécessaire). Tu insistes en parlant de plantes, de cycle… Elle dit que rien n’est prouvé, que ce n’est pas son domaine. Elle est là pour vous aider à avoir un enfant avec l’aide de la médecine moderne. Tu lui dis « Mais y’a quand même des effets secondaires à prendre des hormones. » Elle balaye ça d’un revers de main en disant que pas plus que n’importe quelle pilule. Tu demandes de quelle hormone il s’agit, elle réponds évasivement. Pourtant, tu l’interroges sur l’injection de ce produit. Sa réponse « comme de l’insuline, faut piquer dans le gras de la cuisse. » Tu veux savoir à quoi ça ressemble. Elle finit par sortir un exemple de seringue et à te montrer le geste. Tu dis que tu ne sais pas. Elle conclut par « Quand vous serez prêt à faire quelque chose, revenez me voir et d’ici là monsieur ça serait bien que vous perdiez du poids, c’est pour votre santé que je dis ça. Même si on a pas vu d’effet sur votre fertilité, ça n’aide pas. » Vous partez. Vous décidez de ne pas y retourner.

Ce que je vous raconte n’est que mon expérience, une expérience on ne peut plus banale, j’en suis certaine mais qui laisse voir le mépris avec lequel on considère les femmes (du moins, je n’ai que cet aspect là). On nous dénigre. On nie notre souffrance et notre corps. Notre capacité à comprendre. On nous infantilise en nous considérant comme pas capable de comprendre.

source : documentaire de Nina Faure

On n’essaye pas de chercher la cause du problème, on veut vous ranger dans une case et vite. Vous envoyez sur la table, vous piquer, vous faire bouffer des cachets. Encore une fois, je ne crois pas que c’est volontaire de leur part. Ils sont juste formatés par le système totalement patriarcal qui fait que même les femmes se mettent à faire ces choses à d’autres femmes. C’est la suprématie de la science et des médecins alors qu’en vrai, certains en savent moins que nous. Mais ils ont leur sacro-saint diplôme et ils pensent savoir. Quand ils ne connaissent pas ce dont tu leur parles c’est forcément des conneries, des trucs de « bonnes femmes ». Harmonie, on est d’accord, ce n’est pas normal ? On ne doit pas laisser faire ça !

Bref, je m’emballe ! Cela est vraiment flagrant dans le milieu gynécologique car c’est là que nous sommes le plus vulnérable en tant que femme car ça touche quelque chose de terriblement profond en nous, ce qu’on associe à notre féminité (sans doute à tord) mais aussi quelque chose qui est caché. On ne peut voir notre utérus, ni nos trompes, nous dépendons donc d’eux. Et ça les arrange. Ils ont réussi avec leur chasse aux sorcières. On se garde bien de nous donner accès aux informations mais j’ai déjà parlé de ce sujet. Je crois d’ailleurs que ce phénomène est bien plus large que seulement gynécologiques.

Il y a les violences médicales, les violences qui font que j’ai peur d’aller chez mon médecin traitant quand je suis malade car je sais qu’il va me dire que je fais ma chochotte et que si ! Avec 40 de fièvre je peux aller travailler, il suffit que je m’habille chaudement, que je prenne du Doliprane et que je boive beaucoup d’eau. Vous rendez-vous compte qu’on ne m’a jamais proposé d’avoir une seule journée pour me remettre de mes fausses-couches ? Et puis, il y a ce regard jugeant quand tu dis que tu n’aimes pas prendre des médicaments. Le « Ben si vous voulez pas guérir… » Ou quand tu affirmes avoir mal quelque part et que rien n’est visible et qu’il te dit « bah c’est dans votre tête ». Personne n’a jamais dit ça à mon mec par exemple, alors même que ces douleurs ne sont pas forcément visibles non plus .

Moi quand je dis à un médecin que je souffre du genou, il me répond que c’est pas possible. Quand j’affirme avoir des brûlures d’estomac qui me remonte dans la gorge quand j’ai une angine, on me dit que c’est impossible… Bref ne nous laissons pas faire ! J’ai beaucoup de colère contre ce système et aussi contre moi qui hurle ici mais qui face à un médecin et à la suprématie de la blouse blanche ne pipe mot quand une telle situation se passe… parce que je me sens ridicule, infantilisé, dénigrée et que je me tais parce qu’il doit mieux savoir que moi ce qu’il en est.

C’est faux ! C’est mon corps !!! Mes douleurs ! Mes souffrances ! Je sais quand ça va ou pas, quand c’est normal ou pas et quand je ne sais pas, je veux qu’on m’explique mais pas avec des mots d’enfant, pas avec des mots trop technique juste comme une personne à une personne pour que je puisse savoir ce qu’il se passe. Merde ! Je finirais sur ce mot, pas très glorieux, certes, mais je crois ça résume ma colère !

Et vous, qu’est ce que vous en pensez ?

Et ce que vous avez déjà vécu ce genre de situation ? Pensez-vous que c’est normal ? Est-ce seulement les femmes qui subissent ce genre de violence ? J’ai une petite réponse à ça ! Non pas que les femmes, toutes les personnes qui ne sont pas blanches, minces et homme… subissent ce genre de traitement et ce n’est pas normal ! De mon côté, je n’ai que mon genre qui pose problème par rapport à la norme de la société et pourtant… Que se passe-t’il pour une femme grosse et de couleur ? J’en ai la boule au ventre !

Ellega

PS : un documentaire Paye (pas) ton gynéco (dont je me suis permise de piquer la photo) par ici

2 commentaires

  • Iléana

    Bon dieu !
    Je suis retournée de voir ce que tu as vécu !
    De mon côté, je n’hésite pas à changer de médecins autant de fois qu’il le faut. Depuis qu’on est en Drôme, je n’ai pas encore trouvé LE médecin de famille… mais il ne faut pas baisser les bras ! Il en existe !

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